LOHENGRIN AU FESTIVAL DE MUNICH

© Wilfried Hösl/ Bayerische Staatsoper

Le miracle « Klaus Florian Vogt » a encore opéré dans LOHENGRIN, à MUNICH !!!

Dans le cadre du Festival d’été d’Opéra de Munich, Lohengrin, opéra « romantique » de Richard Wagner est repris, dans la production du metteur en scène hongrois, cinéaste et homme de théâtre, Kornél Mundruczo, créée en décembre 2022 au Staatsoper. Elle sera d’ailleurs redonnée à partir de février 2024.

Sous la direction du chef français François-Xavier ROTH, très apprécié à Munich (et cela à juste titre) une distribution exceptionnelle et un orchestre de haut-vol ont sauvé le spectacle (pas trop convaincant) qui propose une vision un peu limitée, ni choquante, ni vulgaire, ni emballante de l’œuvre romantique du compositeur. Au cœur du travail de Mundruczo se trouve l’idée d’une communauté, d’un monde fermé. Pas de cygne, pas de chevaliers, ni de châteaux romantiques au bord du Rhin…

Le rideau se lève sur cette communauté, tout de blanc vêtue, pas très élégante (jeans et sweets blancs) qui semble faire face à un désastre climatique symbolisé par un morceau de météorite posé sur le plateau. On ne saura jamais si le désastre est en cours ou à venir ? Il est matérialisé par ces longs imperméables transparents portés par les solistes, les chœurs et les figurants dès le 2e acte ??

Vêtue de noir au milieu de cette foule en blanc, Elsa von Brabant incarne le trublion de la crise politique engendrée par les querelles de succession autour du trône de Brabant. Pauvre Elsa, elle patauge avec ses bottes en caoutchouc couleur kaki dans une espèce de mare aux canards (à défaut de cygne).

Le Roi Henri (dit l’Oiseleur) doit partir à la guerre et ne pourra pas braver le furieux Telramund qui profère des accusations calomnieuses contre Elsa.

C’est alors que dans la foule, s’avance un homme qui sera le défenseur d’Elsa et au également le gardien du trône du Roi Henri. Dans la mise en scène de Mundruczo, il n’est ni envoyé par Dieu, ni par Parsifal, mais simplement un opportuniste qui saisit l’occasion au bon moment. En résumé, Lohengrin est un démagogue qui tait son nom et son origine pour mieux tromper son monde, faire de fausses promesses, mais que tous applaudissent. Même Elsa fume des joints pour mieux croire aux promesses de Lohengrin. Seuls Ortrud et son vil mari Telramund ne sont pas convaincus par Lohengrin. Dans le livret de Wagner, Ortrud est sensée être une sorcière mais le metteur en sène en fait une femme ni tout à faire méchante, ni tout à fait gentille (comme tous les autres personnages d’ailleurs).

Une énorme météorite menace d’écraser tout le monde au final, mais rien ne sera réglé, comme actuellement. Mundruczo a démontré dans sa mise en scène qu’Elsa et Lohengrin sont des « narcissiques », avides de reconnaissance. Pour mieux nous convaincre, Lohengrin porte un manteau proche de l’armure du samouraï et Elsa une tenue qu’elle déploie tel un soleil, pour la célébration du mariage !!!!!

Il convient tout de même de souligner quelques beaux effets visuels et une scénographie astucieuse.

Heureusement, pour le grand bonheur des spectateurs, la distribution est exceptionnelle et l’orchestre prestigieux. A commencer, par Klaus Florian Vogt dans le rôle-titre. Il est « LOHENGRIN ». A ce jour, peu de ténors l’égalent et malgré les années qui passent, personne ne le surclasse. Il a le physique, la prestance, la gestuelle chevaleresque du rôle. Son chant est tout simplement « divin ». Il aborde le récit du Graal avec une fraîcheur impeccable. La puissance de sa voix est bien dosée, ses aigus toujours aussi clairs et sonores, sa diction élégante. Sa présence sur scène est un véritable « enchantement ».

A ses côtés, la soprano sud-africaine Johanni van Oostrum campe une Elsa vocalement et psychologiquement très crédible. Elle sait tenir tête à ses partenaires, même si le metteur en scène en a fait une adolescente rebelle. Elle bénéficie d’une belle voix mordorée, avec un timbre rond et pur. Elle domine bien ses différentes situations : la dispute avec Ortrud, ses rêves et le basculement dans la folie au 3e acte jouit d’une parfaite interprétation. Elle sera Elsa à Paris en septembre et à Strasbourg dans le même rôle en mars 2024, aux côtés de Michael Spyres dans le rôle-titre. Hâte de les voir et les écouter  !!!

C’est Anja Kampe qui incarne à perfection le rôle plein de noirceur d’Ortrud. Elle accentue le côté machiavélique du personnage. Sa technique est parfaite, sa voix est toujours aussi claire, mais sait être effrayante dans certains registres. Son interprétation est tout simplement grandiose. Son partenaire Telramund est interprété par Johan Reuter, plus faible que détestable. Sa tessiture n’est pas très étendue, mais il possède une diction limpide et parfaite et est convaincant dans son rôle.

Mika Kares campe un roi Henri captivant, humain et bienveillant. Il a toujours gardé cette belle voix de basse noble et imposante.

Les chœurs si imposants et importants dans Lohengrin sont plus qu’excellents. Ils font preuve de puissance, d’enthousiasme et sont scéniquement impeccables et très habités.

L’Orchestre du Bayerische Staatsoper (qui fête cette année ses 500 ans d’existence), mené magistralement par François-Xavier Roth est exceptionnel. Plein de respect pour les chanteurs, le chef livre une direction admirable, très soignée pour mettre en valeur tantôt la noirceur des personnages sombres tantôt le lyrisme et la tendresse pour accompagner les acteurs radieux.

Un petit détail : quelle bonne idée a eu le chef de placer les trompettes en loge latérale aux deux premiers actes et dans la loge royale au 3e. Cette disposition a rendu un effet sonore formidable.

Que d’émotions, quelle apothéose !!! Un enchantement !!!

De longs et chaleureux applaudissements de la part du public séduit et conquis ont récompensé la prestation des solistes, choristes, figurants, musiciens et bien sûr le chef, visiblement très ému.

Marie-Thérèse Werling

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