Un cadeau du roi Louis II au ténor Franz Nachbaur

Cette bague est actuellement présentée dans les vitrines de l’exposition In meiner Vorstellung. Die Welt der exklusiven Aufführungen von König Ludwig II. au Deutsches Theatermuseum München.
Pour lire l’article de présentation de l’expositionhttps://cerclerichardwagner-rivedroite.com/fr/le-monde-des-representations-privees-du-roi-louis-ii-une-exposition-du-deutsches-theatermuseum-de-munich/
Collection Jean-Louis (Munich)
Bague en argent avec un motif de cygne présentée dans sa boîte d’origine. Cadeau de reconnaissance offert par le roi Louis II au ténor Franz Nachbaur (1830-1902)  pour son rôle de Lohengrin.
Le ténor Franz Nachbaur était tenu en haute estime par le roi. Pour son rôle de Lohengrin, le roi lui offrit une armure d’argent. Il reçut également une bague en argent avec le sceau en relief d’un cygne. Louis II invita également Nachbaur dans son jardin d’hiver afin que le chanteur puisse y interpréter des passages choisis de Lohengrin dans un cadre enchanteur.
Franz Nachbaur, ténor wagnérien et favori du Roi Louis II 
Franz Nachbaur en couverture du journal viennois
Der Floh du 5 novembre 1876
Franz (Ignaz) Nachbaur (1835-1902) fut un célèbre ténor allemand d’opéra et un des meilleurs interprètes des opéras de Wagner.
Il entra en 1866 dans la compagnie de l’opéra de Munich par ordre du roi Louis II qui suivait ce faisant la recommandation de Richard Wagner. Il signa en 1869 un contrat de 10 ans avec le théâtre de Munich (aux appointements de 8 000 florins annuels, plus la garantie des feux et une pension à la fin du contrat). Il y resta actif jusqu’à sa retraite en 1890. En 1869, il fut payé 1 200 florins pour 2 représentations des Maîtres chanteurs à Carlsruhe.
Chanteur favori du roi Louis II de Bavière, qui le faisait venir pour chanter, pour lui seul, Lohengrin dans une barque à quelque distance de la rive du lac Starnberg, aux abords du château, revêtu de l’armure en argent qu’il lui avait offerte. [d’après Jacques Bainville]
Il fit ses débuts à Londres en 1882 dans le rôle d’Euryanthe. Il a également chanté avec un grand succès pendant quelques saisons en Italie, en interprétant tout spécialement des opéras wagnériens. Sa dernière apparition sur la scène munichoise en octobre 1890 fut la mille et unième fois qu’il chantait dans ce théâtre. Il est décédé à Munich en 1902.
Il créa Walther von Stolzing dans Die Meistersinger von Nürnberg de Wagner le 21 juin 1868 à Munich, en remplacement de Bachmann jugé insuffisant pour tenir le rôle, puis Froh dans Rheingold le 22 septembre 1869 à Munich.
Le journal parisien Le Ménestrel  évoqua à plusieurs reprises les relations particulières du Roi Louis II de Bavière avec Franz Nachbaur :
Le Ménestrel du 12 octobre 1890 :
Un chanteur jadis très fêté, M. Nachbaur, longtemps attaché au théâtre de Munich, vient de prendre sa retraite. M. Nachbaur, qui était un vrai ténor, et dont la voix avait un timbre d’une douceur charmante fut jadis un Lohengrin très admiré. Le roi Louis II de Bavière le tenait en haute estime et l’avait comblé de cadeaux. En 1870 il lui avait envoyé une statuette en marbre, sculptée par Zumbusch, et qui le représente en Lohengrin ; une autre fois il lui envoya un Lohengrin dont la nacelle était en or et le cygne en argent. A la femme du ténor, le malheureux souverain avait un jour donné une broche représentant le cygne de Lohengrin ; le corps du cygne est formé par une perle d’une grosseur énorme les ailes sont figurées par des diamants, le bec par des rubis. M. Nachbaur possède en outre un grand nombre de lettres de Louis II dans lesquelles celui-ci le traite absolument d’égal à égal et parle fréquemment de Richard Wagner, pour lequel on sait que son admiration était sans bornes. Dans une de ces lettres, le roi dit au ténor : « Nous sommes, tous les deux, ennemis de ce qui est banal, trivial, vulgaire; nos cœurs brûlent d’un feu divin pour tout ce qui est pur et idéal. C’est pourquoi nous devons demeurer de fidèles et sincères amis, toute notre vie.»
Le Ménestrel du 2 août 1891 :
Le ténor allemand Nachbaur, dont nous avons annoncé récemment la retraite, vient de publier dans un journal de Munich quelques souvenirs assez curieux sur ses rapports avec le défunt roi de Bavière. Louis II, toujours excessif en ses affections, traitait le ténor presque en camarade. « Nous sommes tous deux ennemis de ce qui est vil, lui écrivait le roi ; nous brûlons tous deux de cette flamme pure et sacrée de l’idéal ; c’est pourquoi nous resterons amis toute notre vie. » Nachbaur a monté tout un musée avec les cadeaux que lui a offerts son royal protecteur ; ce sont pour la plupart des souvenirs relatif à Lohengrin : des barques au cygne en or massif portant I.ohengrin sous les traits de Nachbaur, des épingles, des broches, des plats et jusqu’à une pipe portant les attributs du héros. On remarque aussi deux tables en or massif sur lesquelles sont ciselées les principales scènes de Parsifal et d’Aïda, enfin une quantité prodigieuse de montres à l’effigie du souverain, de portraits et de bagues. Lorsque Nachbaur quittait Munich, appelé par des engagements, Louis II languissait d’ennui, et il lui arrivait souvent de payer le dédit de son chanteur favori pour le ravoir près de lui. Un jour, ils se promenaient ensemble sur le lac artificiel du fameux jardin d’hiver. La barque qui les portait était dorée et avait la forme d’un cygne. Des voix mystérieuses se faisaient entendre, paraissant sortir de l’eau. Le roi était debout dans la barque, prêtant l’oreille et comme perdu dans un rêve. Soudain il se tourna vers le ténor et lui dit d’une voix très douce : « Ah ! que ne sommes-nous dans la baie de Naples ! que ne pouvons-nous glisser sur ses vagues, comme à présent, et écouter le chant éloigné des gondoliers ! » Et il décida que tous deux partiraient ensemble pour ce pays ensoleillé, mais au dernier moment il abandonna son projet. Autant Louis II aimait conférer des faveurs, autant il était sensible aux marques de gratitude. A l’issue des représentations de gala données en son honneur, il fallait que tous les artistes auxquels il avait offert des cadeaux, lui fissent parvenir sans retard des remerciements. Malheur à ceux qui ne se conformaient pas à cet usage ! Ils commettaient, à ses yeux, une offense impardonnable. » « Un jour, bien après minuit, écrit Nachbaur, le roi me fit appeler. Il souffrait d’un violent mal de tète. Je lui chantai l’air du sommeil de la Muette et la prière de Stradella. A deux heures, je m’en retournais Chez moi et, immédiatement, je lui écrivis une lettre pour le remercier de ses bontés à mon égard. Plus lard j’appris que, malgré sa migraine, il se releva anxieux et ne voulut pas se recoucher avant d’avoir reçu ma lettre.»
Nachbaur en Walther von Stolzing dans les Meistersinger
(Gravure dans Die Gartenlaube, 1873

 

 

Luc-Henri ROGER

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